Un puissant symbole de vengeance qui brave le temps
Auguste Vachon, héraut Outaouais émérite
Sur le tympan, à l’entrée principale de l’édifice Louis-Stephen Saint-Laurent sis sur le passage du Chien d’Or (ancienne rue Buade), ville de Québec, apparaît une plaque en pierre ornée d’un chien sculpté en bas-relief, rongeant un os entre ses pattes. L’inscription qui l’accompagne nous apprend qu’il se nourrit et se repose jusqu’au jour où il pourra mordre ceux qui l’ont mordu. L’image et l’inscription portent le spectateur à se demander d’où provient la pierre et quelle en est la signification ? L’intrigante image reflète-t-elle un événement historique ou une légende ? Pourquoi a-t-on revêtu le chien de dorure ? En plus de chercher des réponses à ces questions, le présent article analyse la pénétration de cette image symbolique dans la conscience collective en soulignant la littérature qu’elle a suscitée, sa présence sur des objets souvenirs et son évocation chez ceux qui cherchent, peut-être la justice, mais surtout la vengeance.
1) Le périple de la plaque
La plaque en pierre avec l’inscription et le chien rongeant son os orne à l’origine la maison du chirurgien Timothée Roussel construite en 1688 sur la rue Buade à Québec. En 1734, les héritiers de Roussel vendent la maison au négociant Nicolas Jacquin dit Philibert où il aménage son logis, des bureaux et des magasins. Le spacieux bâtiment sert également d’auberge et éventuellement de salle de réunion pour les francs-maçons. À partir de 1846, on y aménage un comptoir de poste et, en 1872, le gouvernement fédéral érige un grand bureau de poste sur son emplacement et y intègre la plaque. Le bâtiment prend le nom d’édifice Louis-Stephen St-Laurent le 11 juin 1984 et la rue Buade se nomme maintenant passage du Chien d’Or.
La gravure (fig. 1) montre un entablement et deux fioritures s’apparentant à la lettre « S » de chaque côté du chien. Les mêmes motifs architecturaux se retrouvent sur la figure 2 et sur les cartes postales (fig. 3 et 5), mais pas sur l’édifice actuel. Ceci s’explique du fait que ces quatre illustrations reproduisent la tablette en pierre du bâtiment original comme le fait aussi une photographie de Jules-Ernest Livernois prise avant l’érection du bureau de poste en 1872 [1].
1) Le périple de la plaque
La plaque en pierre avec l’inscription et le chien rongeant son os orne à l’origine la maison du chirurgien Timothée Roussel construite en 1688 sur la rue Buade à Québec. En 1734, les héritiers de Roussel vendent la maison au négociant Nicolas Jacquin dit Philibert où il aménage son logis, des bureaux et des magasins. Le spacieux bâtiment sert également d’auberge et éventuellement de salle de réunion pour les francs-maçons. À partir de 1846, on y aménage un comptoir de poste et, en 1872, le gouvernement fédéral érige un grand bureau de poste sur son emplacement et y intègre la plaque. Le bâtiment prend le nom d’édifice Louis-Stephen St-Laurent le 11 juin 1984 et la rue Buade se nomme maintenant passage du Chien d’Or.
La gravure (fig. 1) montre un entablement et deux fioritures s’apparentant à la lettre « S » de chaque côté du chien. Les mêmes motifs architecturaux se retrouvent sur la figure 2 et sur les cartes postales (fig. 3 et 5), mais pas sur l’édifice actuel. Ceci s’explique du fait que ces quatre illustrations reproduisent la tablette en pierre du bâtiment original comme le fait aussi une photographie de Jules-Ernest Livernois prise avant l’érection du bureau de poste en 1872 [1].
Fig. 1. La tablette en pierre du chien rongeant son os telle que dessinée par William Ogle Carlisle avant la démolition de la maison originale pour faire place au bureau de poste construit en 1872. Gravure parue dans Canadian Illustrated News, 18 août 1870, p. 101.
2) Liens avec la France
Suite à une enquête sur les origines de la plaque au chien, l’historien Benjamin Sulte reçoit la réponse suivante d’un correspondant du Midi de la France qui cite Pierre Paul Poncet, auteur de la première Histoire de la ville de Pézenas des origines à 1733 :
«Une notice de l'historien Poncet, sur Pézenas, antérieure à 1733, raconte que, en revenant des (frères ?) Observants, à la descente qui va à la ville, on trouve une porte bâtie depuis la catastrophe du pont ( ?) sur laquelle est un chien en relief sur la pierre, couché sur ses pattes qui tiennent un os qu'il ronge. On lit au bas : 1661 et ces lettres capitales A.Z.R., avec les vers suivants: «Je suis un chien qui ronge l'os. / En le rongeant je prends repos. / Un temps viendra qui n'est venu / Où je mordrai qui m'a mordu [2].»
L’inscription à Québec se lit : « Je svis vn chien qvi ronge lo / En le rongeant je prend mon repos / Vn tems viendra qvi nest pas venv / Qve je morderay qvi mavra mordv » [3]. Il est évident qu’un lien existe entre le chien de Pézenas et celui de Québec puisque les mots sont presque identiques dans les deux cas.
La description d’un chien semblable se retrouve dans les mémoires d’Henri Nasers de Latude, un repris de justice né à Montagnac en 1725 et mort à Paris en 1805 :
« En entrant à Bicêtre, voulant substituer un autre nom au mien, que je craignais de souiller en l’y portant, j’ai pris, par cette raison, celui de Jedors, faisant allusion à celui d'un chien placé au-dessus de la citadelle d'une de nos villes, tenant entre ses pattes un os, avec ces mots : “Je me repose en rongeant mon os, en attendant le jour où je mordrai celui qui m'a mordu.” Ce nom [Jedors] me rappelait sans cesse ma situation, et chaque fois que je le prononçais ou que je l’entendais prononcer, le grincement de mes dents, le serrement de mon âme m’apprenaient que je n’attendais que le jour et l’occasion qui me conduiraient à la vengeance [4]. »
Bien que Latude ne précise pas de ville, Sulte croit qu’il a vu le même chien que décrit Poncet puisque Montagnac, sa ville natale dans l’Hérault, est à moins de 10 kilomètre de Pézenas. Il retrace ensuite, toujours en citant Poncet, la source d’une querelle qui aurait donné naissance à l’image du chien et de son os :
«Le mur du jardin sur lequel est le chien est fort ancien, il existait en 1340. Par succession de temps, ce jardin passa à monsieur Delbousquet. Après sa mort, il fut vendu à Antoine Boyer, jardinier, puis il appartint à son fils Pierre qui m'a expliqué cette inscription : Monsieur Delbousquet avait une métairie près de Saint-Simon. Il y avait là une superbe orangerie que monsieur le connétable [M. de Montmorency] découvrait du château de Pézenas. La trouvant à son goût, il la demanda à M. Delbousquet qui, par son silence, fit comprendre à ce duc qu'il ne voulait pas s'en défaire. Fâché d'un tel refus, le duc la fit enlever pendant la nuit. Le lendemain matin, le gentilhomme (Delbousquet ?) voyant les vestiges de ce désordre, comprit que c'était l'effet d'un ordre du connétable. Ne pouvant se venger de ce sanglant affront, il fit sculpter un chien, avec l'inscription que l'on connaît [5].»
Selon un autre témoignage, Delbousquet se serait vengé de son vivant de la rapine perpétrée sur son orangerie. Il raconte qu’à la tombée de la nuit, le connétable de Montmorency fut surpris par un violent orage après s’être enlisé avec son carrosse dans la boue d’un chemin peu praticable. Ne pouvant dégager sa voiture avec un seul cheval et voyant Delbousquet venir sur le chemin, le connétable le supplia de le tirer de sa fâcheuse situation. Saisissant l’occasion, Delbousquet lui récita les vers gravés sous le chien et poursuit son chemin en riant. Montmorency comprit le message, se tut et se résigna à braver la foudroyante tempête et les eaux montantes de l’Hérault, jusqu’au matin où les secours viendraient [6]. Quoiqu’il en soit, ces récits se situent tous dans la même région.
Montpellier, ville natale du chirurgien Roussel, se trouve aussi dans l’Hérault non loin de Pézenas. En reproduisant le chien et l’os sur la façade de sa maison, Roussel voulait peut-être rappeler sa région natale, mais l’image correspondait bien à son tempérament d’homme « coléreux et âpre au gain » qui portait souvent des causes devant le Conseil souverain [7].
3. Pourquoi un chien d’or ?
Le chien, aujourd’hui sur l’édifice Louis-Stephen Saint-Laurent, est doré comme aussi le lettrage. D’où vient cette dorure qui n’a pas toujours été visible (fig. 3) ? Latude offre un début d’explication en s’affublant du nom Jedors inspiré par le chien avec son os qu’il voit comme un chien assoupi. Dans sa préface, Sulte pécise : « À Québec on fit un autre jeu de mots en dorant la bête, d'où le chien dort ou le chien d'or. » Sulte avait aussi préparé un peu de poésie concernant le roman de William Kirby qui tardait à paraître : « Quand paraîtra votre Chien d'Or / Je ne serai plus un jeune homme. / Voilà longtemps qu'il mange et dort / Et vous favorisez son somme [8]. » De prime abord, on pourrait penser que la dorure du chien s’inspire du livre de Kirby, mais ce n’est pas forcément le cas. Lors de la restauration de la tablette de pierre, Mme Isabelle Paradis, restauratrice au Centre de conservation du Québec, a retrouvé des feuilles d’or sous des couches de peinture à la bronzine (poudre de cuivre) qui donne un effet doré [9]. Cette découverte atteste que le chien revêtait sa dorure dans un passé lointain et ouvre la possibilité que l’appellation « chien d’or » se soit transmise jusqu’à Kirby par tradition orale. Sur un plan pratique, la dorure met le chien en évidence et permet aux spectateurs de lire plus facilement l’inscription.
4. Naissance des légendes
À l’issus d’une dispute entre le marchand Nicolas Jacquin dit Philibert et l’officier Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Legardeur de Repentigny au sujet d’un billet de logement que Philibert refusait d’honorer, le militaire porta un coup fatal au marchand. Les circonstances de sa mort ont donné lieu à plusieurs interprétations [10]. De même, la mystérieuse image du chien qui ronge son os en attendant le jour de sa vengeance a fait naître plusieurs légendes. L’une d’elle provient de Kirby lui-même qui affirme que l’os est celui d’un humain [11]. Sur la page titre d’une de ses éditions, une gravure montre le chien rongeant ce qui semble être un fémur humain, vraisemblablement dans le but de justifier l’affirmation de l’auteur (fig. 2). L’os sur la tablette de pierre originale ne semble pas particulièrement identifiable (fig. 3 et 5).
Le Journal de l’Instruction publique de mai 1860 consacre sa première page à la légende du chien d’or. Il cite une tradition populaire selon laquelle la veuve de Philibert, Marie-Anne Guérin, aurait placé la plaque au chien pour inciter leur fils à venger son père. Un poème de F. R. Angers, avocat, lie le chien et l’inscription à l’assassinat de Philibert : « Philibert meurt percé du fer d'un assassin / Qui fuit, mais au vengeur ne peut cacher sa trace; / Car le sang demandé ne le fut pas en vain. / Le temps n'ose frapper le Chien d'Or de son aile; / Il reste plus entier que le fait qu'il rappelle [12]. »
L’image du chien rancunier suscita plusieurs autres légendes. L’officier anglais John Knox, qui n’en connaissait ni l’origine ni le sens, formulait une interprétation assez surprenante à l’effet qu’il symboliserait la fidélité de la colonie à défendre le roi et le pays contre les assauts des Amérindiens [13]. D’autres versions imputent l’assassinat de Philibert, soit à l’intendant Michel Bégon de la Picardière, soit à l’intendant François Bigot [14]. Ces hypothèses n’ont aucun sens puisque l’intendance de Bégon date de 1710 à 1726 et, lorsque Bigot arriva à Québec le 26 août 1748, Philibert était déjà mort, notamment le 21 janvier de la même année [15]. Une autre fable provenant de Kirby porte sur une histoire d’amour entre Pierre, fils de Philibert, et Amélie de Repentigny. L’un des sombres personnages de son roman, Angélique Des Meloises, avait réussi à persuader le frère d’Amélie, Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Le Gardeur de Repentigny, de tuer Philibert [16]. La figure historique nommée Angélique Renaud d’Avène Des Méloizes, réputée la maîtresse de l’intendant Bigot, était mariée au militaire et marchand Michel-Jean-Hugues Péan. On a commenté son rôle dans le roman ainsi : « … elle fut l’héroïne du roman célèbre de William Kirby, The Golden Dog (New York, 1877), où la fiction l’emporte trop facilement sur la vérité historique [17]. »
Suite à une enquête sur les origines de la plaque au chien, l’historien Benjamin Sulte reçoit la réponse suivante d’un correspondant du Midi de la France qui cite Pierre Paul Poncet, auteur de la première Histoire de la ville de Pézenas des origines à 1733 :
«Une notice de l'historien Poncet, sur Pézenas, antérieure à 1733, raconte que, en revenant des (frères ?) Observants, à la descente qui va à la ville, on trouve une porte bâtie depuis la catastrophe du pont ( ?) sur laquelle est un chien en relief sur la pierre, couché sur ses pattes qui tiennent un os qu'il ronge. On lit au bas : 1661 et ces lettres capitales A.Z.R., avec les vers suivants: «Je suis un chien qui ronge l'os. / En le rongeant je prends repos. / Un temps viendra qui n'est venu / Où je mordrai qui m'a mordu [2].»
L’inscription à Québec se lit : « Je svis vn chien qvi ronge lo / En le rongeant je prend mon repos / Vn tems viendra qvi nest pas venv / Qve je morderay qvi mavra mordv » [3]. Il est évident qu’un lien existe entre le chien de Pézenas et celui de Québec puisque les mots sont presque identiques dans les deux cas.
La description d’un chien semblable se retrouve dans les mémoires d’Henri Nasers de Latude, un repris de justice né à Montagnac en 1725 et mort à Paris en 1805 :
« En entrant à Bicêtre, voulant substituer un autre nom au mien, que je craignais de souiller en l’y portant, j’ai pris, par cette raison, celui de Jedors, faisant allusion à celui d'un chien placé au-dessus de la citadelle d'une de nos villes, tenant entre ses pattes un os, avec ces mots : “Je me repose en rongeant mon os, en attendant le jour où je mordrai celui qui m'a mordu.” Ce nom [Jedors] me rappelait sans cesse ma situation, et chaque fois que je le prononçais ou que je l’entendais prononcer, le grincement de mes dents, le serrement de mon âme m’apprenaient que je n’attendais que le jour et l’occasion qui me conduiraient à la vengeance [4]. »
Bien que Latude ne précise pas de ville, Sulte croit qu’il a vu le même chien que décrit Poncet puisque Montagnac, sa ville natale dans l’Hérault, est à moins de 10 kilomètre de Pézenas. Il retrace ensuite, toujours en citant Poncet, la source d’une querelle qui aurait donné naissance à l’image du chien et de son os :
«Le mur du jardin sur lequel est le chien est fort ancien, il existait en 1340. Par succession de temps, ce jardin passa à monsieur Delbousquet. Après sa mort, il fut vendu à Antoine Boyer, jardinier, puis il appartint à son fils Pierre qui m'a expliqué cette inscription : Monsieur Delbousquet avait une métairie près de Saint-Simon. Il y avait là une superbe orangerie que monsieur le connétable [M. de Montmorency] découvrait du château de Pézenas. La trouvant à son goût, il la demanda à M. Delbousquet qui, par son silence, fit comprendre à ce duc qu'il ne voulait pas s'en défaire. Fâché d'un tel refus, le duc la fit enlever pendant la nuit. Le lendemain matin, le gentilhomme (Delbousquet ?) voyant les vestiges de ce désordre, comprit que c'était l'effet d'un ordre du connétable. Ne pouvant se venger de ce sanglant affront, il fit sculpter un chien, avec l'inscription que l'on connaît [5].»
Selon un autre témoignage, Delbousquet se serait vengé de son vivant de la rapine perpétrée sur son orangerie. Il raconte qu’à la tombée de la nuit, le connétable de Montmorency fut surpris par un violent orage après s’être enlisé avec son carrosse dans la boue d’un chemin peu praticable. Ne pouvant dégager sa voiture avec un seul cheval et voyant Delbousquet venir sur le chemin, le connétable le supplia de le tirer de sa fâcheuse situation. Saisissant l’occasion, Delbousquet lui récita les vers gravés sous le chien et poursuit son chemin en riant. Montmorency comprit le message, se tut et se résigna à braver la foudroyante tempête et les eaux montantes de l’Hérault, jusqu’au matin où les secours viendraient [6]. Quoiqu’il en soit, ces récits se situent tous dans la même région.
Montpellier, ville natale du chirurgien Roussel, se trouve aussi dans l’Hérault non loin de Pézenas. En reproduisant le chien et l’os sur la façade de sa maison, Roussel voulait peut-être rappeler sa région natale, mais l’image correspondait bien à son tempérament d’homme « coléreux et âpre au gain » qui portait souvent des causes devant le Conseil souverain [7].
3. Pourquoi un chien d’or ?
Le chien, aujourd’hui sur l’édifice Louis-Stephen Saint-Laurent, est doré comme aussi le lettrage. D’où vient cette dorure qui n’a pas toujours été visible (fig. 3) ? Latude offre un début d’explication en s’affublant du nom Jedors inspiré par le chien avec son os qu’il voit comme un chien assoupi. Dans sa préface, Sulte pécise : « À Québec on fit un autre jeu de mots en dorant la bête, d'où le chien dort ou le chien d'or. » Sulte avait aussi préparé un peu de poésie concernant le roman de William Kirby qui tardait à paraître : « Quand paraîtra votre Chien d'Or / Je ne serai plus un jeune homme. / Voilà longtemps qu'il mange et dort / Et vous favorisez son somme [8]. » De prime abord, on pourrait penser que la dorure du chien s’inspire du livre de Kirby, mais ce n’est pas forcément le cas. Lors de la restauration de la tablette de pierre, Mme Isabelle Paradis, restauratrice au Centre de conservation du Québec, a retrouvé des feuilles d’or sous des couches de peinture à la bronzine (poudre de cuivre) qui donne un effet doré [9]. Cette découverte atteste que le chien revêtait sa dorure dans un passé lointain et ouvre la possibilité que l’appellation « chien d’or » se soit transmise jusqu’à Kirby par tradition orale. Sur un plan pratique, la dorure met le chien en évidence et permet aux spectateurs de lire plus facilement l’inscription.
4. Naissance des légendes
À l’issus d’une dispute entre le marchand Nicolas Jacquin dit Philibert et l’officier Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Legardeur de Repentigny au sujet d’un billet de logement que Philibert refusait d’honorer, le militaire porta un coup fatal au marchand. Les circonstances de sa mort ont donné lieu à plusieurs interprétations [10]. De même, la mystérieuse image du chien qui ronge son os en attendant le jour de sa vengeance a fait naître plusieurs légendes. L’une d’elle provient de Kirby lui-même qui affirme que l’os est celui d’un humain [11]. Sur la page titre d’une de ses éditions, une gravure montre le chien rongeant ce qui semble être un fémur humain, vraisemblablement dans le but de justifier l’affirmation de l’auteur (fig. 2). L’os sur la tablette de pierre originale ne semble pas particulièrement identifiable (fig. 3 et 5).
Le Journal de l’Instruction publique de mai 1860 consacre sa première page à la légende du chien d’or. Il cite une tradition populaire selon laquelle la veuve de Philibert, Marie-Anne Guérin, aurait placé la plaque au chien pour inciter leur fils à venger son père. Un poème de F. R. Angers, avocat, lie le chien et l’inscription à l’assassinat de Philibert : « Philibert meurt percé du fer d'un assassin / Qui fuit, mais au vengeur ne peut cacher sa trace; / Car le sang demandé ne le fut pas en vain. / Le temps n'ose frapper le Chien d'Or de son aile; / Il reste plus entier que le fait qu'il rappelle [12]. »
L’image du chien rancunier suscita plusieurs autres légendes. L’officier anglais John Knox, qui n’en connaissait ni l’origine ni le sens, formulait une interprétation assez surprenante à l’effet qu’il symboliserait la fidélité de la colonie à défendre le roi et le pays contre les assauts des Amérindiens [13]. D’autres versions imputent l’assassinat de Philibert, soit à l’intendant Michel Bégon de la Picardière, soit à l’intendant François Bigot [14]. Ces hypothèses n’ont aucun sens puisque l’intendance de Bégon date de 1710 à 1726 et, lorsque Bigot arriva à Québec le 26 août 1748, Philibert était déjà mort, notamment le 21 janvier de la même année [15]. Une autre fable provenant de Kirby porte sur une histoire d’amour entre Pierre, fils de Philibert, et Amélie de Repentigny. L’un des sombres personnages de son roman, Angélique Des Meloises, avait réussi à persuader le frère d’Amélie, Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Le Gardeur de Repentigny, de tuer Philibert [16]. La figure historique nommée Angélique Renaud d’Avène Des Méloizes, réputée la maîtresse de l’intendant Bigot, était mariée au militaire et marchand Michel-Jean-Hugues Péan. On a commenté son rôle dans le roman ainsi : « … elle fut l’héroïne du roman célèbre de William Kirby, The Golden Dog (New York, 1877), où la fiction l’emporte trop facilement sur la vérité historique [17]. »
Fig. 2. Sur cette représentation, le chien semble ronger un fémur humain pour correspondre à la description de Kirby : « a couchant dog, knawing the thigh bone of a man ». William KIRBY, The Chien D`or –The Golden Dog: a Legend of Quebec, New York et Montréal, Lovell, Adam, Wesson & Company, 1877, vignette sur la page titre et p. 116 : http://eco.canadiana.ca/view/oocihm.07186/3?r=0&s=1.
Fig. 3. Cette carte postale place le chien d’or au centre de nombreux emblèmes : les armoiries royales du Royaume-Uni, le Red Ensign, et les écus des provinces et territoires canadiens. On peut la dater du fait que les armes assignées à la Saskatchewan le 25 août 1906 y figurent (au centre à droite) alors que celles assignées à l’Alberta le 30 mai 1907 ne s’y trouvent pas. Ce qui représente l’Alberta (en bas à droite) est un emblème conçu pour les Territoires du Nord-Ouest par Edward Marion Chadwick en 1900, voir : https://www.heraldicscienceheraldique.com/arms-and-devices-of-provinces-and-territories.html, fig. 27-32. Carte par Warwick Bro’s & Rutter, Limited, Printers, Toronto.
Fig. 4. Le chien doré accompagne le sceau de la ville de Québec conçu par Joseph Légaré en 1833 : voir https://www.heraldicscienceheraldique.com/la-meacutedaille-kebeca-liberata-a-t-elle-inspireacute-le-premier-sceau-de-la-ville-de-queacutebec.html. Carte postale inscrite « Entered according to Act of the Parliament of Canada, in the year 1902, L. H. LUKE, at the Department of Agriculture. »
5. Des objets souvenirs
La légende du chien d’or a donné lieu à une grande quantité d’objets souvenirs comme des cartes postales, des produits commerciaux, des heurtoirs de portes, des enseignes, des partitions musicales et des pièces de céramique dont ceux de la fameuse compagnie de miniatures héraldiques William Henry Goss [18]. Deux des cartes postales illustrant cet article se signalent par le fait qu’elles placent le chien d’or au même niveau que d’autres emblèmes : les armoiries du Royaume-Uni et des provinces et territoires canadiens (fig. 3) et le sceau de la ville de Québec (fig. 4). Le fait que tellement de ces souvenirs portent des inscriptions anglaises et proviennent de compagnie hors la province de Québec, dont plusieurs sont au Royaume-Uni, illustre à quel point la légende avait pris racine chez les Canadiens anglophones. Il est également intéressant de constater que, de façon générale, ces souvenirs ne disent rien au sujet des antécédents ou de la signification du chien d’or, comme si ces choses étaient déjà bien connues. En fait, les interprétations et légendes entourant le chien d’or ont enthousiasmé beaucoup d’auteurs anglais [19].
La légende du chien d’or a donné lieu à une grande quantité d’objets souvenirs comme des cartes postales, des produits commerciaux, des heurtoirs de portes, des enseignes, des partitions musicales et des pièces de céramique dont ceux de la fameuse compagnie de miniatures héraldiques William Henry Goss [18]. Deux des cartes postales illustrant cet article se signalent par le fait qu’elles placent le chien d’or au même niveau que d’autres emblèmes : les armoiries du Royaume-Uni et des provinces et territoires canadiens (fig. 3) et le sceau de la ville de Québec (fig. 4). Le fait que tellement de ces souvenirs portent des inscriptions anglaises et proviennent de compagnie hors la province de Québec, dont plusieurs sont au Royaume-Uni, illustre à quel point la légende avait pris racine chez les Canadiens anglophones. Il est également intéressant de constater que, de façon générale, ces souvenirs ne disent rien au sujet des antécédents ou de la signification du chien d’or, comme si ces choses étaient déjà bien connues. En fait, les interprétations et légendes entourant le chien d’or ont enthousiasmé beaucoup d’auteurs anglais [19].
Fig. 5. Plusieurs cartes postales ne montrent que le chien avec son os et l’inscription qui incarnent un symbolisme à la fois simple et énigmatique comme tous les grands symboles. Cette carte est datée du 6 août 1908 par l’expéditeur. Elle est titrée en lettres rouges, en bas à droite, « CHIEN D’OR / GOLDEN DOG, QUEBEC » ce qui correspond au titre du roman de Kirby. Bien que l’éditeur soit anonyme, il s’agit d’une édition anglaise puisque toutes les inscriptions du côté adresse (recto) sont en anglais. Vers 1930, la Photogelatine Engraving Co. Ltd. de Toronto publiait une carte semblable.
6. Des vers souvent cités
Quand j’étais adolescent, je me souviens que mon père récitait intégralement les vers du chien d’or lorsqu’une occasion se présentait. Ceci était surprenant du fait qu’il n’avait que quelques années de scolarité et avait toujours vécu dans le Nord de l’Ontario. Il lisait beaucoup, mais le fait qu’il répétait les mots de mémoire me donne à penser qu’ils lui venaient de la tradition orale. Plus tard, un traducteur qui était mécontent de son sort au sein de la fonction publique fédérale et militait pour un redressement me confiait son désir de rétribution en citant le premier vers « Je suis un chien qui ronge l’os » et il savait que je saisissais exactement sa pensée. Je suis persuadé que beaucoup de personnes au Québec et dans le reste du Canada francophone se souviennent d’avoir entendu ces vers ou les ont cités eux-mêmes. J’ignore si le chien de Pézenas a connu un rayonnement semblable à celui au Québec et s’il y a eu en France plusieurs représentations à son image.
Quand j’étais adolescent, je me souviens que mon père récitait intégralement les vers du chien d’or lorsqu’une occasion se présentait. Ceci était surprenant du fait qu’il n’avait que quelques années de scolarité et avait toujours vécu dans le Nord de l’Ontario. Il lisait beaucoup, mais le fait qu’il répétait les mots de mémoire me donne à penser qu’ils lui venaient de la tradition orale. Plus tard, un traducteur qui était mécontent de son sort au sein de la fonction publique fédérale et militait pour un redressement me confiait son désir de rétribution en citant le premier vers « Je suis un chien qui ronge l’os » et il savait que je saisissais exactement sa pensée. Je suis persuadé que beaucoup de personnes au Québec et dans le reste du Canada francophone se souviennent d’avoir entendu ces vers ou les ont cités eux-mêmes. J’ignore si le chien de Pézenas a connu un rayonnement semblable à celui au Québec et s’il y a eu en France plusieurs représentations à son image.
***
L’esprit de vengeance semble inné chez l’être humain et peut se manifester individuellement ou collectivement. Le chien qui ronge son os s’apparente à l’humain qui rumine longuement sa vengeance et cette image trouve une résonance profonde et universelle chez l’homme. La vengeance constitue une forme de justice féroce, généralement en dehors de la loi. Des deux tranchants du glaive de la justice, c’est le côté ébréché.
N.B.
Tous les sites internet ont été consultés le 20 juillet 2019. Les cartes postales 3 à 5 appartiennent à la collection d’Auguste et Paula Vachon.
Tous les sites internet ont été consultés le 20 juillet 2019. Les cartes postales 3 à 5 appartiennent à la collection d’Auguste et Paula Vachon.
Appendice
Réflexions sur l’imagerie et les symboles de vengeance
La symbolique du chien est surtout positive. Fidèle ami de l’homme et gardien des humains et des bêtes, il sert de guide sur le plan terrestre et symboliquement entre le monde des vivants et des morts. Comme Prométhée, il aurait apporté le feu aux hommes et comme Hermès il serait pourvu de vertus médicinales. Sur le plan négatif, il incarnerait la gloutonnerie et l’appétit sexuel débridé. On le voit aussi comme créature impure du fait qu’il mange des restants, voire de la charogne. Il est cependant surprenant qu’il se retrouve au centre d’une image symbolisant la vengeance telle qu’illustrée par cet article.
Les images symboliques comportent un côté matériel représenté par une figure et un côté abstrait, souvent spirituel, qu’on lui confère mentalement. Matériellement, une hostie n’est qu’une rondelle de pain blanc, un besant d’argent en langue du blason, mais ce que cette rondelle représente pour les chrétiens va bien au-delà de ses apparences. De même, le chien qui ronge un os présente une scène paisible. Sur la plaque de pierre, c’est l’inscription qui prête à l’animal des intentions vindicatives. Ceci n’enlève rien à la valeur symbolique de l’image. La signification des symboles est rarement évidente. Si elle n’est pas consignée d’une façon ou d’une autre, elle peut demeurer cachée à jamais ou faire l’objet de conjectures interminables qui versent souvent dans l’ésotérisme. Il est à noter cependant que l’explication écrite n’a pas empêché les légendes de proliférer autour du chien d’or, comme il arrive pour beaucoup de symboles.
Parmi les nombreux ouvrages que j’ai consultés concernant les symboles et les mythes, le plus important étant le Dictionnaire des symboles de Chevalier et Gheerbrant, aucun ne mentionne le chien comme symbole de vengeance. Les deux exemples décrits ici, à Québec et à Pézenas, sont peut-être uniques en leur genre. Il ne semble pas non plus que les symboles de vengeance soient très nombreux. À ce chapitre, il importe de distinguer entre un symbole et la représentation d’une scène historique ou mythique. L’assassinat de Jean-Paul Marat par Charlotte Corday en 1793 constitue un acte de vengeance puisqu’elle écrit à son père «J'ai vengé bien d'innocentes victimes ». Ce geste, généralement vu comme héroïque, a fait l’objet de nombreuses peintures et gravures, mais il s’agit de la reconstitution artistique, plus ou moins fidèle, d’un fait avéré et non d’un symbole qui représente toujours autre chose que ce que l’on voit, que ce qu’il incarne physiquement. De même, Oreste tuant sa mère pour venger le meurtre de son père par elle et son amant a inspiré de nombreuses œuvres d’art, mais là encore, il s’agit de la reconstitution d’un drame mythique et non pas d’un symbole où le visuel ne révèle rien, ou très peu de sa signification. L’exemple du chien qui ronge paisiblement son os illustre ceci à merveille. Rien de l’image ne laisse soupçonner qu’il rumine une vengeance éventuelle. C’est l’esprit humain qui lui prête son désir de représailles.
Personne n’a de monopole sur la signification que peut revêtir un symbole. Le soleil et la croix sont des symboles universels, mais leur sens varie d’une civilisation à l’autre. Une poupée vaudou transpercée d’aiguilles semblerait représenter un symbole de vengeance convaincant, mais cette figure pourrait aussi bien refléter la volonté d’éliminer un rival. D’ailleurs, je ne sache pas qu’on ait inséré une telle figure dans un emblème réel comme des armoiries, un drapeau ou un insigne. Les symboles expriment davantage des concepts positifs que des notions sinistres ou lugubres comme la vengeance ou la haine.
Les images symboliques comportent un côté matériel représenté par une figure et un côté abstrait, souvent spirituel, qu’on lui confère mentalement. Matériellement, une hostie n’est qu’une rondelle de pain blanc, un besant d’argent en langue du blason, mais ce que cette rondelle représente pour les chrétiens va bien au-delà de ses apparences. De même, le chien qui ronge un os présente une scène paisible. Sur la plaque de pierre, c’est l’inscription qui prête à l’animal des intentions vindicatives. Ceci n’enlève rien à la valeur symbolique de l’image. La signification des symboles est rarement évidente. Si elle n’est pas consignée d’une façon ou d’une autre, elle peut demeurer cachée à jamais ou faire l’objet de conjectures interminables qui versent souvent dans l’ésotérisme. Il est à noter cependant que l’explication écrite n’a pas empêché les légendes de proliférer autour du chien d’or, comme il arrive pour beaucoup de symboles.
Parmi les nombreux ouvrages que j’ai consultés concernant les symboles et les mythes, le plus important étant le Dictionnaire des symboles de Chevalier et Gheerbrant, aucun ne mentionne le chien comme symbole de vengeance. Les deux exemples décrits ici, à Québec et à Pézenas, sont peut-être uniques en leur genre. Il ne semble pas non plus que les symboles de vengeance soient très nombreux. À ce chapitre, il importe de distinguer entre un symbole et la représentation d’une scène historique ou mythique. L’assassinat de Jean-Paul Marat par Charlotte Corday en 1793 constitue un acte de vengeance puisqu’elle écrit à son père «J'ai vengé bien d'innocentes victimes ». Ce geste, généralement vu comme héroïque, a fait l’objet de nombreuses peintures et gravures, mais il s’agit de la reconstitution artistique, plus ou moins fidèle, d’un fait avéré et non d’un symbole qui représente toujours autre chose que ce que l’on voit, que ce qu’il incarne physiquement. De même, Oreste tuant sa mère pour venger le meurtre de son père par elle et son amant a inspiré de nombreuses œuvres d’art, mais là encore, il s’agit de la reconstitution d’un drame mythique et non pas d’un symbole où le visuel ne révèle rien, ou très peu de sa signification. L’exemple du chien qui ronge paisiblement son os illustre ceci à merveille. Rien de l’image ne laisse soupçonner qu’il rumine une vengeance éventuelle. C’est l’esprit humain qui lui prête son désir de représailles.
Personne n’a de monopole sur la signification que peut revêtir un symbole. Le soleil et la croix sont des symboles universels, mais leur sens varie d’une civilisation à l’autre. Une poupée vaudou transpercée d’aiguilles semblerait représenter un symbole de vengeance convaincant, mais cette figure pourrait aussi bien refléter la volonté d’éliminer un rival. D’ailleurs, je ne sache pas qu’on ait inséré une telle figure dans un emblème réel comme des armoiries, un drapeau ou un insigne. Les symboles expriment davantage des concepts positifs que des notions sinistres ou lugubres comme la vengeance ou la haine.
A Powerful Symbol of Revenge that Defies Time
Summary
The tympanum above the main entrance to the Louis Stephen St-Laurent Building on the passage du Chien d’Or in Quebec City displays a stone tablet on which a golden dog carved in low relief gnaws a bone held between its paws. The tablet bears an enigmatic inscription which I have translated as: “I am a dog gnawing a bone / While doing so, I find repose / A day will come that is yet to be / When I will bite those who bit me.” The carving was inspired by a similar one with an almost identical inscription found in the town of Pézenas, Department of l’Hérault, southern France. The Quebec tablet was originally on a large house built in 1688 for the surgeon Timothée Roussel who immigrated from l’Hérault and was known to have a vindictive streak. In 1734 the house was acquired by the merchant Nicolas Jacquin dit Philibert and, when it gave way to a large post office building in 1872, the stone tablet was kept and placed where it is today.
The dog in France was the object of several interpretations as to its origin and meaning. Kirby made his own contribution to the mysteries attached to the Québec tablet by stating that the dog was chewing on “the thigh bone of a man” (fig. 2), something that is not supported by photographs of the actual artefact (fig. 3). Other legends are linked to the assassination of the merchant Philibert by the officer Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Legardeur de Repentigny following a dispute over a billeting order that Philibert refused to acknowledge. It is reported that Philibert`s wife had the dog carving installed as an incentive for her son to avenge for his father’s death. This makes no sense since the fatal assault took place on 21 January 1748 long after the creation of the stone. Other attempts were made to blame the homicide on the influence of the New France intendants Michel Bégon de la Picardière and François Bigot, but again this is pure fantasy since neither man was in Quebec City on the date of the fateful event. One of the great debunkers of the many fables associated with the vengeful dog was the antiquarian Jacques Viger, first mayor of Montreal.
The stone image and inscription were given new life in 1877 with the publication of a work by William Kirby entitled The Chien D`or –The Golden Dog: a Legend of Quebec. Today the dog and inscription on the stone are gilded, but the title of Kirby’s work alone could not have justified adding the gold colouring. When the artefact was restored recently by the Centre de conservation du Québec, gold leaf was found under coats of bronze paint used to imitate gold, meaning that the dog was perhaps golden from its origin.
I have heard the verses of the golden dog quoted by francophones who liked their message or were seeking retribution for some injustice. But the legend of the dog with its bone gained remarkable popularity among anglophone Canadians as witnessed by the number of English writings on the subject and the many golden dog souvenirs with English titles. These souvenirs take the form of postcards, ceramic pieces, commercial products and signs, musical scores and even door knockers. Postcards (figs. 3-4) are of special interest as they combine the chewing dog with other important emblems. In figure 3, it is surrounded by the royal arms of the United Kingdom, the Red Ensign and the shields of Canadian provinces and territories while, in figure 4, it accompanies the old seal of Quebec City.
The two examples described here, one in Quebec and one in Pézenas, of the dog and bone symbolizing revenge may be unique. Symbols more frequently express positive concepts than negative or dismal ones. Revenge is a universal sentiment which is here rendered with a simple image and a few verses. The fact that the stone tablet gave rise to numerous legends can be expected since all strong symbols tend to generate lore. A.V.
The dog in France was the object of several interpretations as to its origin and meaning. Kirby made his own contribution to the mysteries attached to the Québec tablet by stating that the dog was chewing on “the thigh bone of a man” (fig. 2), something that is not supported by photographs of the actual artefact (fig. 3). Other legends are linked to the assassination of the merchant Philibert by the officer Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Legardeur de Repentigny following a dispute over a billeting order that Philibert refused to acknowledge. It is reported that Philibert`s wife had the dog carving installed as an incentive for her son to avenge for his father’s death. This makes no sense since the fatal assault took place on 21 January 1748 long after the creation of the stone. Other attempts were made to blame the homicide on the influence of the New France intendants Michel Bégon de la Picardière and François Bigot, but again this is pure fantasy since neither man was in Quebec City on the date of the fateful event. One of the great debunkers of the many fables associated with the vengeful dog was the antiquarian Jacques Viger, first mayor of Montreal.
The stone image and inscription were given new life in 1877 with the publication of a work by William Kirby entitled The Chien D`or –The Golden Dog: a Legend of Quebec. Today the dog and inscription on the stone are gilded, but the title of Kirby’s work alone could not have justified adding the gold colouring. When the artefact was restored recently by the Centre de conservation du Québec, gold leaf was found under coats of bronze paint used to imitate gold, meaning that the dog was perhaps golden from its origin.
I have heard the verses of the golden dog quoted by francophones who liked their message or were seeking retribution for some injustice. But the legend of the dog with its bone gained remarkable popularity among anglophone Canadians as witnessed by the number of English writings on the subject and the many golden dog souvenirs with English titles. These souvenirs take the form of postcards, ceramic pieces, commercial products and signs, musical scores and even door knockers. Postcards (figs. 3-4) are of special interest as they combine the chewing dog with other important emblems. In figure 3, it is surrounded by the royal arms of the United Kingdom, the Red Ensign and the shields of Canadian provinces and territories while, in figure 4, it accompanies the old seal of Quebec City.
The two examples described here, one in Quebec and one in Pézenas, of the dog and bone symbolizing revenge may be unique. Symbols more frequently express positive concepts than negative or dismal ones. Revenge is a universal sentiment which is here rendered with a simple image and a few verses. The fact that the stone tablet gave rise to numerous legends can be expected since all strong symbols tend to generate lore. A.V.
Notes
[1] La photographie appartient à Bibliothèque et Archives Canada. Voir : http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-526/Le_Chien_d%E2%80%99Or.html#.XPPhMBZKiij, à la fin de l’article.
[2] Préface de Benjamin Sulte dans William KIRBY, Le Chien d’Or, La Bibliothèque électronique du Québec, Collection Littérature québécoise, vol. 85, version 1.2, p. 14 : http://beq.ebooksgratuits.com/pdf/Kirby-chien-1.pdf. Le chien de Pézenas existe toujours. L’inscription sur le piédestal de la sculpture se lit : « Je suis le chien » au lieu de « Je suis un chien » :
http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-526/Le_Chien_d%E2%80%99Or.html#.XM__BjBKiij. Les frères observants formaient une branche des Franciscains.
[3] En français moderne « Je suis un chien qui ronge l'os / En le rongeant je prends mon repos. / Un temps viendra qui n'est pas venu / Où je mordrai qui m'a mordu.»
[4] Mémoires de Henri Nasers de Latude, prisonnier pendant trente-cinq ans à la Bastille, à Vincennes, à Charenton et à Bicêtre, Gand, Imprimerie F.L. Dullé-Plus, 1841, p. 169 : https://books.google.ca/books?id=fpRJAAAAcAAJ&printsec=frontcover&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false.
[5] http://beq.ebooksgratuits.com/pdf/Kirby-chien-1.pdf, p. 14-15.
[6] John KNOX, An Historical Journal of the Campaign in North America …, vol. 3, Toronto, Champlain Society, p. 351 : https://archive.org/details/historicaljourna10knox/page/350.
[7] Biographie de Timothée Roussel dans Dictionnaire biographique du Canada : http://www.biographi.ca/fr/bio/roussel_timothee_1F.html.
[8] Préface de Benjamin Sulte dans William KIRBY, op. cit., p. 11-12, 14.
[9] Voir un article à ce sujet et une belle illustration de la tablette restaurée : Annie MORIN, « Le chien d'or retrouve son éclat d'antan » dans Le Soleil, 1er février 2015 :
https://www.lesoleil.com/actualite/la-capitale/le-chien-dor-retrouve-son-eclat-dantan-18436fa984fcb1b1fa10805333db8abe.
[10] Au sujet des circonstances controversées entourant le décès de Nicolas Jacquin dit Philibert, voir sa biographie: http://www.biographi.ca/fr/bio/jacquin_nicolas_3F.html et celle de Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Legardeur de Repentigny : http://www.biographi.ca/fr/bio/legardeur_de_repentigny_pierre_jean_baptiste_francois_xavier_4F.html.
[11] William KIRBY, Le chien d'or : légende Canadienne, traduit de l’anglais par L.P. [Pamphile] Le May, Montréal, Imprimerie de l’Étendard, 1884, p. 165 : https://archive.org/details/lechiendorlegend00kirb/page/n170.
[12] Journal de l'Instruction publique, mai 1860, vol. 4, no 5, page de titre : http://eco.canadiana.ca/view/oocihm.8_06257_41/2?r=0&s=4. L’introduction à la version numérisée suivante, reprend le contenu de la page : http://gutenbergcanada.ca/ebooks/kirbylemay-chiendor/kirbylemay-chiendor-00-h-dir/kirbylemay-chiendor-00-h.html. Un autre récit fantaisiste date de 1839 : A.S.S. [Auguste Soulard], « Le chien d’or à Québec » dans Le Canadien, 20 nov. 1839, p. 1, http://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3455121.
[13] John KNOX, op. cit., vol. 2, p. 208 : https://archive.org/details/historicaljourna09knox/page/208.
[14] Biographie de Nicolas Jacquin dit Philibert : http://www.biographi.ca/fr/bio/jacquin_nicolas_3F.html et http://www.ameriquefrancaise.org/media-5091/chien_annexe.pdf. On a aussi imaginé que le chien et l’os représentait la rivalité entre Anglais et Français : https://evelynebuenaventes.wordpress.com/2009/09/16/le-chien-a-toutes-les-sauces/.
[15] Dès le XIXe siècle, l’antiquaire Jacques Viger (1787-1858), premier maire de Montréal, démentait l’implication des intendants Bégon ou Bigot dans l’assassinat de Philibert : Robert CHRISTIE, A History of the Late Province of Lower Canada …, vol. 4, Québec, John Lovell, 1853, p. 105-106 (note), 306-314 : https://books.google.ca/books?id=57sNAAAAQAAJ&printsec=frontcover&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false et Canadian Illustrated News, 13 août 1870, p. 98, http://eco.canadiana.ca/view/oocihm.8_06230_41/3?r=0&s=1.
[16] https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/the-golden-dog-le-chien-dor-a-legend-of-quebec et l’édition traduite de l’anglais par Pamphile Le May, p. 261, 290 : https://archive.org/details/lechiendorlegend00kirb/page/n749.
[17] http://www.biographi.ca/fr/bio/renaud_d_avene_des_meloizes_angelique_4F.html.
[18] http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-526/Le_Chien_d%E2%80%99Or.html#.XM8HLDBKiih et Nicholas PINE, The Price Guide to Arms and Decorations on Goss China, Horndean, Waterlooville (Hampshire): Milestone Publications, 1991, p. 229-230. On voit aussi le chien d’or sur un pichet conservé au Musée de l’Amérique française à Québec : Hélène-Andrée BIZIER and Claude PAULETTE, Fleur de lys d’hier à aujourd’hui, Montréal, Éditions Art Global, 1997, p. 95.
[19] Voir « Différentes interprétations du chien d’or » : http://www.ameriquefrancaise.org/media/upload/PDFs/Annexe_Le_chien_dor.pdf. En plus des auteurs anglophones déjà cités dans cet article, mentionnons Alfred HAWKIN, Picture of Quebec With Historical Recollections, Québec, Nelson and Cowan, 1834, p. 259-260 : https://archive.org/details/hawkinsspicture00fishgoog/page/n296.
[1] La photographie appartient à Bibliothèque et Archives Canada. Voir : http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-526/Le_Chien_d%E2%80%99Or.html#.XPPhMBZKiij, à la fin de l’article.
[2] Préface de Benjamin Sulte dans William KIRBY, Le Chien d’Or, La Bibliothèque électronique du Québec, Collection Littérature québécoise, vol. 85, version 1.2, p. 14 : http://beq.ebooksgratuits.com/pdf/Kirby-chien-1.pdf. Le chien de Pézenas existe toujours. L’inscription sur le piédestal de la sculpture se lit : « Je suis le chien » au lieu de « Je suis un chien » :
http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-526/Le_Chien_d%E2%80%99Or.html#.XM__BjBKiij. Les frères observants formaient une branche des Franciscains.
[3] En français moderne « Je suis un chien qui ronge l'os / En le rongeant je prends mon repos. / Un temps viendra qui n'est pas venu / Où je mordrai qui m'a mordu.»
[4] Mémoires de Henri Nasers de Latude, prisonnier pendant trente-cinq ans à la Bastille, à Vincennes, à Charenton et à Bicêtre, Gand, Imprimerie F.L. Dullé-Plus, 1841, p. 169 : https://books.google.ca/books?id=fpRJAAAAcAAJ&printsec=frontcover&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false.
[5] http://beq.ebooksgratuits.com/pdf/Kirby-chien-1.pdf, p. 14-15.
[6] John KNOX, An Historical Journal of the Campaign in North America …, vol. 3, Toronto, Champlain Society, p. 351 : https://archive.org/details/historicaljourna10knox/page/350.
[7] Biographie de Timothée Roussel dans Dictionnaire biographique du Canada : http://www.biographi.ca/fr/bio/roussel_timothee_1F.html.
[8] Préface de Benjamin Sulte dans William KIRBY, op. cit., p. 11-12, 14.
[9] Voir un article à ce sujet et une belle illustration de la tablette restaurée : Annie MORIN, « Le chien d'or retrouve son éclat d'antan » dans Le Soleil, 1er février 2015 :
https://www.lesoleil.com/actualite/la-capitale/le-chien-dor-retrouve-son-eclat-dantan-18436fa984fcb1b1fa10805333db8abe.
[10] Au sujet des circonstances controversées entourant le décès de Nicolas Jacquin dit Philibert, voir sa biographie: http://www.biographi.ca/fr/bio/jacquin_nicolas_3F.html et celle de Pierre-Jean-Baptiste-François-Xavier Legardeur de Repentigny : http://www.biographi.ca/fr/bio/legardeur_de_repentigny_pierre_jean_baptiste_francois_xavier_4F.html.
[11] William KIRBY, Le chien d'or : légende Canadienne, traduit de l’anglais par L.P. [Pamphile] Le May, Montréal, Imprimerie de l’Étendard, 1884, p. 165 : https://archive.org/details/lechiendorlegend00kirb/page/n170.
[12] Journal de l'Instruction publique, mai 1860, vol. 4, no 5, page de titre : http://eco.canadiana.ca/view/oocihm.8_06257_41/2?r=0&s=4. L’introduction à la version numérisée suivante, reprend le contenu de la page : http://gutenbergcanada.ca/ebooks/kirbylemay-chiendor/kirbylemay-chiendor-00-h-dir/kirbylemay-chiendor-00-h.html. Un autre récit fantaisiste date de 1839 : A.S.S. [Auguste Soulard], « Le chien d’or à Québec » dans Le Canadien, 20 nov. 1839, p. 1, http://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3455121.
[13] John KNOX, op. cit., vol. 2, p. 208 : https://archive.org/details/historicaljourna09knox/page/208.
[14] Biographie de Nicolas Jacquin dit Philibert : http://www.biographi.ca/fr/bio/jacquin_nicolas_3F.html et http://www.ameriquefrancaise.org/media-5091/chien_annexe.pdf. On a aussi imaginé que le chien et l’os représentait la rivalité entre Anglais et Français : https://evelynebuenaventes.wordpress.com/2009/09/16/le-chien-a-toutes-les-sauces/.
[15] Dès le XIXe siècle, l’antiquaire Jacques Viger (1787-1858), premier maire de Montréal, démentait l’implication des intendants Bégon ou Bigot dans l’assassinat de Philibert : Robert CHRISTIE, A History of the Late Province of Lower Canada …, vol. 4, Québec, John Lovell, 1853, p. 105-106 (note), 306-314 : https://books.google.ca/books?id=57sNAAAAQAAJ&printsec=frontcover&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false et Canadian Illustrated News, 13 août 1870, p. 98, http://eco.canadiana.ca/view/oocihm.8_06230_41/3?r=0&s=1.
[16] https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/the-golden-dog-le-chien-dor-a-legend-of-quebec et l’édition traduite de l’anglais par Pamphile Le May, p. 261, 290 : https://archive.org/details/lechiendorlegend00kirb/page/n749.
[17] http://www.biographi.ca/fr/bio/renaud_d_avene_des_meloizes_angelique_4F.html.
[18] http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-526/Le_Chien_d%E2%80%99Or.html#.XM8HLDBKiih et Nicholas PINE, The Price Guide to Arms and Decorations on Goss China, Horndean, Waterlooville (Hampshire): Milestone Publications, 1991, p. 229-230. On voit aussi le chien d’or sur un pichet conservé au Musée de l’Amérique française à Québec : Hélène-Andrée BIZIER and Claude PAULETTE, Fleur de lys d’hier à aujourd’hui, Montréal, Éditions Art Global, 1997, p. 95.
[19] Voir « Différentes interprétations du chien d’or » : http://www.ameriquefrancaise.org/media/upload/PDFs/Annexe_Le_chien_dor.pdf. En plus des auteurs anglophones déjà cités dans cet article, mentionnons Alfred HAWKIN, Picture of Quebec With Historical Recollections, Québec, Nelson and Cowan, 1834, p. 259-260 : https://archive.org/details/hawkinsspicture00fishgoog/page/n296.